« Aussi longtemps que Dieu est père, je reste un enfant. Je ne suis pas affranchi complètement du désir autistique d'omniscience et d'omnipotence. Je n'ai pas encore acquis l'objectivité qui me permettrait de prendre conscience de mes limites humaines, de mon ignorance, de ma faiblesse. Semblable à un enfant, je revendique la présence d'un père qui me secoure, me protège, me punisse, d'un père qui m'aime lorsque je lui obéis, qui est flatté par mes éloges et irrité par mes incartades. Indiscutablement la plupart des gens en sont restés à ce stade infantile : ils croient en Dieu comme en un père toujours près à les aider - illusion puérile. Cette vue a été dépassée par quelques grands maîtres de l'humanité, et par une minorité d'hommes, mais elle demeure la forme prédominante de la religion. »
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Erich Fromm
L'art d'aimer |
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« Si deux personnes qui sont étrangères, comme nous le sommes tous, laissent soudainement s'abattre le mur qui les séparait, et se sentent proches, se sentent une, ce moment d'unicité est une des expériences les plus vivifiantes et les plus émouvantes de la vie. Il est d'autant plus merveilleux et miraculeux pour les personnes qui ont vécu séparées, isolées, sans amour. Ce miracle de soudaine intimité est souvent facilité s'il s'associe à, ou est suscité par l'attraction et la consommation sexuelle. Cependant, de par sa nature même, ce type d’amour n'est pas durable. Les deux personnes s'accoutument l'une à l'autre, leur intimité perd de plus en plus son caractère miraculeux, jusqu'à ce que leur antagonisme, leurs déceptions, leur ennui mutuel, tuent ce qui a pu subsister de l'émoi initial. »
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Erich Fromm
L'art d'aimer |
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« Le sommeil est la seule situation qui convient à l'inactivité, l'éveil est la seule où la paresse ne devrait avoir aucune part. Le paradoxe est qu'aujourd'hui bien des gens sont à moitié endormis quand ils sont éveillés, et à moitié éveillés quand ils sont endormis, ou disposés à dormir. Pour ne pas s'ennuyer ni être ennuyeux, ce qui de tout évidence est une des principales conditions de l'amour, il faut être pleinement éveillé : être actif en pensée, en sentiment, avec ses yeux et ses oreilles, tout au long de la journée, sans se contenter de recevoir ou de thésauriser, sans perdre carrément son temps. Il est utopique de croire que la vie puisse être compartimentée. On ne saurait être productif dans le domaine de l'amour sans l'être dans tous les autres domaines. La productivité exclut une telle division du travail. Pour aimer, nous devons nous tenir dans un état d'éveil intense, de puissante vitalité, qui implique nécessairement une orientation productive et active en de nombreuses sphères de la vie. »
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Erich Fromm
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