« De la naissance à la mort, du lundi au lundi, du matin au soir - toutes les activités sont routinées et prébrabriquées. Comment un homme pris dans ce filet de routine n'oublierait-il pas qu'il est un homme, un individu unique, qui n'a reçu que cette seule chance de vivre, avec des espoirs et des désillusions, avec des peines et des craintes, avec le désir nostalgique de l'amour et la terreur du néant et de la séparation ? »
|
Erich Fromm
L'art d'aimer |
Erich Fromm
L'art d'aimer
|
« L'initiative individuelle fut un puissant levain pour l'économie et le développement personnel au temps du capitalisme libéral. Mais elle revêt deux aspects : elle favorise uniquement des qualités choisies de l'homme, sa volonté et son efficacité, tout en le laissant en proie au Minotaure économique. C'était un principe qui fonctionnait mieux pendant la phase individuelle de la concurrence (...). Aujourd'hui, le commerce de détail, l'artisanat et la petite industrie se rétrécissent chaque jour comme la peau de chagrin. Seule une minorité peut encore faire preuve d'initiative. »
|
Erich Fromm
La peur de la liberté |
Erich Fromm
La peur de la liberté
|
« L'amour est une sollicitude active pour la vie et la croissance de ce que nous aimons. Là où manque ce souci actif, il n'y a pas d'amour. Cette dimension de l'amour a été admirablement décrite dans le livre de Jonas. Dieu dit à Jonas de se rendre à Ninive et d'avertir ses habitants qu'ils seront châtiés s'ils ne renoncent pas à leur conduite perverse. Mais Jonas, craignant que le peuple de Ninive ne se repente et que Dieu ne lui pardonne, se dérobe à sa mission. C'est un homme qui possède au plus haut point le sens de l'ordre et de la loi, mais sans amour. Cependant, dans sa tentative de fuite, il se retrouve dans le ventre d'une baleine, symbole de l'état d'isolement et d'emprisonnement auquel l'a conduit son manque d'amour et de solidarité. Dieu le sauve, et Jonas se rend à Ninive. Il prêche aux habitants comme Dieu le lui avait prescrit, et voilà qu'arrive cela même qu'il craignait. Les hommes de Ninive se repentent de leurs péchés, rectifient leur conduite, et Dieu leur pardonne et décide de ne pas détruire la ville. Jonas en conçoit un profond dépit et une vive irritation, il voulait que « justice » fût faite, non miséricorde. Finalement, il puise quelque réconfort à l'ombre d'un arbre que Dieu avait fait croître pour lui afin de le protéger du soleil. Mais quand Dieu fait en sorte que l'arbre se dessèche, Jonas déprimé se plaint avec colère. Dieu lui répond : « Tu te prends de pitié au sujet d'un ricin pour lequel tu n'as pas travaillé, que tu n'as pas fait croître, qu'une nuit a vu naître et qu'une nuit a vu périr. Et moi, je, n'épargnerais pas Ninive, cette ville florissante, dans laquelle il y a plus de cent vingt mille personnes qui ne savent distinguer leur main droite de leur main gauche, et aussi beaucoup de bétail ? ». La réponse de Dieu à Jonas est à comprendre symboliquement. Dieu explique à Jonas que l'essence de l'amour est de « se donner de la peine » pour quelque chose et de « faire croître » quelque chose, que l'amour et le travail sont inséparables. On aime ce pour quoi l'on peine et l'on peine pour ce qu'on aime. »
|
Erich Fromm
L'art d'aimer |
Erich Fromm
L'art d'aimer
|