« L'attention que je porte à l'orthographe, à la syntaxe - au point que si je rencontre à chaque page des fautes dans un manuscrit, je m'en détourne aussitôt -, je n'y vois pas une survivance scolaire. Cela concerne la justesse du mot qui est aussi rendre justice à ce qui est nommé, au corps des choses, à leur chair. Pour un peu, j'assimilerais une faute d'orthographe à la mutilation d'un corps, d'un visage, d'un arbre, d'une fleur. Pour un peu, j'y verrais un attentat, un crime, un sacrilège! Me déprendrai-je jamais qu'à défaut d'être la chose même, les mots du moins n'ont pas le droit de lui faire injure? »
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Jean-Bertrand Pontalis
Fenêtres |
Jean-Bertrand Pontalis
Fenêtres
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« Et maintenant, c’est maintenant. Et maintenant, c’est aujourd’hui, hier et demain. Nous autres, humains, nous ressentons et croyons que le temps passe, nous prétendons qu’il s’écoule et, plus nous vieillissons, qu’il s’écoule trop vite. Mais le Temps (avec une majuscule) ignore qu’il passe, il est immobile, il n’a pas d’âge. J’ai comme chacun de nous tous les âges si je cesse de découper le Temps. »
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Jean-Bertrand Pontalis
Avant |
Jean-Bertrand Pontalis
Avant
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« Toujours, j'aurai cherché un subtil équilibre entre le temps qui passe et celui qui ne passe pas. Mieux qu'un équilibre : leur ajointement, leur fusion même, qui se nomme instants de bonheur, cette permanence de l'éphémère qui vient parfois, inespérée, à notre rencontre. Moments de détresse aussi bien, quand le sol cédant sous nos pieds, nous perdons tout recours et qu'il n'y a plus pour nous ni passé ni présent ni futur : nous tombons hors du temps, nous tombons sur place. »
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Jean-Bertrand Pontalis
L'enfant des limbes |
Jean-Bertrand Pontalis
L'enfant des limbes
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