« Prenez-vous en main ! Je définirais la responsabilité comme la capacité de décider à tout moment de notre réaction aux stimuli que nous envoie notre environnement. Certains programmes de notre système limbique (à l'origine de nos émotions) se déclenchent par automatisme en libérant des substances chimiques qui se diffusent dans l'ensemble de notre organisme mais disparaissent en moins d'une minute et demie de notre circulation sanguine. Prenons l'exemple de la colère : il nous arrive de nous emporter comme par réflexe dans certaines circonstances. Des substances chimiques qui perturbent notre équilibre physiologique nous envahissent alors pendant une minute et demie. Elles se dissipent ensuite et notre réaction automatique n'a plus lieu d'être. En résumé : ma colère ne persiste plus d'une minute et demie que lorsque je laisse le circuit neuronal correspondant s'activer en boucle. Je n'en reste pas moins libre à tout moment d'attendre que ma réaction se dissipe en me concentrant sur l'instant présent plutôt que de me laisser happer par le fonctionnement répétitif de mes neurones. »
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Jill Bolte Taylor
Voyage au-delà de mon cerveau (Essais et documents) |
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« Un autre expédient pour échapper à la rumination de notre hémisphère gauche consiste à le prier tout bonnement de chasser les pensées nocives qui nous perturbent. On ne saurait sous-estimer l'efficacité des incantations répétitives telles que les mantras (un terme qui signifie littéralement « lieu de repos de l'esprit »). Il me suffit de respirer à pleins poumons en répétant « Je déborde d'allégresse » ou « Je ne désire rien de plus que ce que je possède » ou encore « Je suis l'un des merveilleux enfants de notre mère la terre » pour basculer aussitôt dans la conscience de mon hémisphère droit. »
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Jill Bolte Taylor
Voyage au-delà de mon cerveau |
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« Rien ne m'a plus donné confiance en moi que de me découvrir enfin libre de ne plus ressasser des pensées génératrices de souffrance. Bien entendu, il n'y a aucun mal à songer à ce qui nous attriste à condition de ne pas perdre de vue la possibilité qui nous est sans cesse offerte de ne plus activer les circuits de neurones correspondants. Cela m'a libérée de savoir que rien ne m'empêchait de chasser mes pensées négatives quand j'en avais assez. Quelle délivrance de me convaincre qu'il ne dépendait que de moi de me laisser envahir par l'amour et la quiétude (de mon hémisphère droit), peu importe ce qui m'arrivait ! Il me suffisait de « virer à droite » en me focalisant sur l'instant présent. Je considère souvent mon entourage du point de vue exempt de tout jugement de mon hémisphère droit, ce qui me permet de conserver ma joie de vivre en échappant aux charges émotives trop fortes. Je reste en définitive la seule à décider de l'influence bonne ou mauvaise de tel incident sur mon humeur. Il n'y a pas très longtemps, je conduisais en chantant à tue-tête au son de l'un de mes disques préférés. À ma grande déconvenue, des policiers m'ont arrêtée pour excès de vitesse. (Il faut croire que mon enthousiasme dépassait les limites !) Depuis que j'ai dû régler la contravention, il m'a fallu me répéter une bonne centaine de fois au moins que je n'avais pas à me laisser abattre pour si peu. Une petite voix désapprobatrice n'arrêtait pas de s'élever en moi en cherchant à me saper le moral : elle voulait ressasser l'incident en long et en large alors que cela n'aurait rien changé ! Franchement, je considère ce genre de rumination de la part de mon hémisphère gauche comme une perte d'énergie épuisante sur le plan émotif. Depuis mon AVC, et, en somme, grâce à lui, j'ai appris à me prendre en main et à ne plus remâcher le passé en me concentrant au contraire sur le présent. »
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Jill Bolte Taylor
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