« Premier stade : 1866, naissance d'une discipline scientifique (l'Ökologie de Haekel) et une science ne fait pas la morale. Deuxième stade, 1968 : transformation d'une science en idéologie, symbole d'une contre-culture rebelle et contestataire. Troisième stade, années 2000, transformation d'une contre-culture en dogme officiel, et d'une discipline garde-fous en litanie cache-misère. On pourrait poursuivre l'asymptote des renversements, vu la facilité déconcertante qu'à la correction d'une injustice pour en produire une deuxième, l’Évangile des Béatitudes pour accoucher de l'Inquisition, et un marxisme égalitaire, des bagnards en Sibérie. Théocratie, Idéocratie et demain Biocratie? Ce n'est pas une raison pour se dérober à l'impérative reconnaissance de biens communs à protéger. C'en est une, tout au plus, pour se demander si d'un "Urgence planète" ne pourrait sortir quelque jour une Biorégion où un haut comité d'experts, flanqué d'hommes à poigne, viendrait proclamer : "Le temps nous est compté. Assez d'atermoiements. On va vous serrer la vis pour vous sauver la vie. Si la Terre, elle, ne ment pas, les humains, eux, sont pleins de turpitudes, et il faut en finir avec ces mensonges qui nous ont fait tant de mal et nous mènent à l'abîme. Adieu les Bisounours et les néo-ruraux sympas. Au boulot." On passerait alors de l'appel au secours à l'organisation des secours, avec contrôle sécuritaire des secourus. Brigades d'inspection des poubelles, incarcération des chasseurs, fumeurs et réfractaires, campagnes de stérilisation forcée. Un enfant et un seul par couple ne venant pas spontanément à l'idée des mamans, seul un État autoritaire et policier pourrait faire respecter les règles malthusiennes qu'imposerait une détresse climatique mettant le couteau sous la gorge des survivants. »
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Régis Debray
Le siècle vert |
Régis Debray
Le siècle vert
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« Depuis que le monde est monde, il faut neuf mois pour faire un enfant, deux ans pour un réseau de résistance, dix pour un parti politique et trente pour une révolution. Depuis que le monde est monde, il faut et il suffit d'une seconde pour tuer un être humain, une minute pour détruire un réseau, une journée pour faire capoter une révolution. `...` Ce qui se passe, c'est que le bonheur prend son temps et que le malheur va vite. Ce qui arrive d'un coup d'un seul, ce n'est pas la vie, c'est l'accident. Il faut par principe s'en méfier. la poker et la foudre n'ont jamais porté bonheur à personne. »
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Régis Debray
Carnet de route |
Régis Debray
Carnet de route
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« L'invention de la perspective géométrique (...) va rendre le regard occidental orgueilleux, et d'abord de sa perspicacité. Perspicere, c'est voir clairement et à fond. (...) Elle va permettre d'éclairer, donc d'évacuer, les mystères, les doubles fonds du visible dans une transparence purement humaine. (p 250) »
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Régis Debray
Vie et mort de l'image |
Régis Debray
Vie et mort de l'image
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